Notes sur les strophes scaldique :

Elles se caractérisent par 8 vers de 6 syllabes chacun.
Les allitérations, qui ne concernent que les premières lettres des mots, régissent l'ensemble :
Deux lettres s'allitèrent dans les vers impairs, et trouvent leur pendant dans le vers suivant.
Lorsque ce sont des consonnes qui sont concernées, il faut obligatoirement identité de cette consonne.
Lorsque ce sont des voyelles, il suffit qu'elles soient de même couleur.
Il y a aussi des rimes à l'intérieur d'un même vers :
demi-rime (une syllabe avec même(s) consonne(s) mais voyelle différente) dans les vers impairs, rime complète (une syllabe avec mêmes voyelle et consonne(s)) dans les vers pairs.
Dans notre exemple les allitérations sont soulignées, les rimes en italiques.
 
 

Færum festar vorar,
ferr særoka að knerri.
Svörð tekr heldr að herða.
Hvar er Akkerisfrakki?

Enn í úlpu grænni
eg fékk dreng til strengja
þann er hnakkmiðum hnykkir.
Hér er Akkerisfrakki.

Déplaçons nos cordes
Les embruns du vent vont vers le bateau
Les cordes (en peau) commencent plutôt à se tendre
Où est Akkerisfrakki ?

J'ai trouvé un garçon habillé en manteau vert
Pour aller chercher la corde
Celui qui secoue la corde de l'ancre
Voilà Akkerisfrakki

(Hallfreðar saga, strophe scaldique n°5)

Structure des vers scaldiques :

Fornyrðislag vient de l'Edda, ce n'est pas de la poésie scaldique à proprement parler.
Il y avait 8 vers, des allitérations mais pas de rimes. C'était des vers de 4 syllabes, avec 2 accentuées et 2 non accentuées. Les syllables accentuées devaient être longues, c'est à dire qu'elles devaient être composées d'une voyelle longue (c-à-d. celles avec accent, á é í ó ú ý + æ, oe et les diftongues) ou bien d'une voyelle brève + 2 consonnes. Les syllabes brèves sont celles avec 1 voyelle + 1 seule consonne.

On a dégagé 5 types de structures :

A :    — × | — ×       ex : Hittusk Aesir
B :    × — | × —       ex : ok miðjan dag
C :    × — | — ×       ex : ok tól gerðu
D :    — | — • ×        ex : hátimbruðu
E :    — (—) × | —   ex : svarfjarðar dró

Le mètre scaldique (de cours) : dróttkvæðr háttr = fornyrðislag (+ les rimes) + 2 syllabes ainsi : — ×

—    :     syllabe longue et accentuée
×     :     syllabe non accentuée
(—)  :     syllabe longue avec un accent accessoire
 •     :     syllabe brève



A :   — × | — ×   (— ×)
D :   — | — • × (?)
E :   — (—) × | — 
A :   — × | — ×
B :   × — | × —
D :   — | — • × 
A :   — × | — ×
A :   — × | — ×

Öll hefir ætt við hylli
Óðins skipað ljóðum,
allgilda man eg, aldar,
iðju vorra niðja.
En trauðr, því að vel Viðris
vald hugnaðist skaldi,
legg eg á frumver Friggjar
fjón því að Kristi þjónum.

Tout le lignage des hommes a arrangé les poèmes pour les faveurs d'Odin. Je me souviens des actions tout à fait valables de nos ancêtres (= la poésie). Mais réticent parce que le pouvoir de Viðris (= Odin) plaisait bien au poète, je me mets à détester le premier mari de Frigg (= Odin) parce que nous servons le christ.

(Hallfreðar saga, strophe scaldique n°10)
 
 
 

Sás með Sygna ræsi
sr að blót eru kvjuð.
Verðum flest að forðast
fornhaldin sköp norna.
Láta allir ýtar
Óðins ætt fyrir róða.
Verð eg og neyddr frá Njarðar
niðjum Krist að bja.

C'est la coutume chez le souverain de Sogn (c-à-d. aussi de la Norvège) que les sacrifices sont interdits. Nous devons éviter la plupart des ordonnances des nornes qui étaient autrefois respectées. Tous les hommes abandonnent le culte d'Odin. Je serai alors forcé d'abandonner les descendants de Njörð pour prier le christ.

(Hallfreðar saga, strophe scaldique n°13)
 

Les techniques :

On trouve :

- des kenningar, métaphonies pour enrober le sens des mots (ex : le mari de Frigg, au lieu de dire Odin),
- des heiti, c'est à dire des mots que l'on ne trouve que dans la langue poétique (mots anciens disparus de la langue courante, ou mots inventés par les poètes), comme "ýtar" pour "les hommes", ou "gumi" pour "l'homme" (au lieu de "maðr").